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Foulées San-Priotes

Publié 17 Février 2015 par Thomas Diconne in route

Foulées San-Priotes

Cette fois nous y voilà, le grand jour est arrivé. La date tant attendue et tant redoutée, deux mois d’entrainement pour venir à bout de… 10km. On aura tout vu… Objectif : 35’59 !

Il fait nuit noire, le réveil sonne. 6h00, déjà… La nuit n’a pas été top mais je me sens reposé. Je sors du lit avec le léger sentiment d’aller à l’abattoir. Je fais un petit dej’ assez sommaire, un fond de bol de lait et quelques biscuits, pas besoin de beaucoup de carburant, les réserves sont faites. J’ai un peu de mal à sortir du potage…

L’air frais me remet les idées en place, je file prendre le métro, metallica à fond dans les oreilles pour me booster. En attendant le tram je tombe sur Ahmed avec qui je discute, il se lance sur son premier 10km, j’essaie de lui donner quelques conseils afin qu’il ne se grille pas. Le tram arrive et nous retrouvons Olivier, nous discutons montagne, vélo entre autres choses, ça permet de vider la tête.

Une fois sur place nous suivons le flot de coureurs, il n’y a aucune pancarte, c’est un peu la misère. Je pense à Laurence qui veut venir me voir à l’arrivée, j’espère qu’elle ne galèrera pas pour trouver, ce serait dommage de manquer ses encouragements…

Nous arrivons rapidement au gymnase, il est 7h50, nous avons encore 1h10 devant nous. Parfait. Pendant qu’il n’y a pas foule je glisse à Olivier qu’il serait judicieux de passer au toilettes. L’idée est brillante, nous nous retrouvons rapidement avec une longue file derrière nous. Nous savourons l’instant, trois kenyans sont derrière nous et ne parviennent pas à nous dépasser, ça n’arrive pas tous les jours !

Nous passons récupérer nos dossards et retrouvons les coureurs de l’AAAL qui ont fait le déplacement en masse, nous serons plus de 40 sur la ligne de départ, les encouragements devraient être au rendez-vous ! Si l’ambiance est plutôt détendue je commence pour ma part à m’enfermer dans ma bulle, le stress commence à monter, je sais que je vais passer un moment difficile, j’ai besoin de faire le vide dans ma tête. Je me change rapidement, j’opte pour un corsaire et des manches longues, je prends également une petite paire de gants que je rangerais dans une poche si j’ai suffisamment chaud avant de poser mon sac à la consigne.

En avant pour l’échauffement ! Je pars avec un petit groupe pour une petite boucle, nous repérons un peu les lieux avant de nous jeter dans le grand bain. Ce petit trot me permet d’évacuer pendant un temps la pression que je me suis mis sur les épaules. Mes jambes semblent répondre correctement, je suis assez confiant sur mon état de forme. Le terrain de jeu m’inquiète nettement plus, le profil semblait vallonné mais je m’attendais à des faux plats plutôt qu’à de bonnes côtes. Pas de panique, on verra bien ce que ça donne en cours de route… Coup de grâce pour mon moral, Alex m’annonce que le parcours fait en réalité 10,140km. J’évite de réfléchir aux implications de la chose mais je commence à me dire que le 10km de Villeurbanne arrive bientôt si je veux retenter ma chance…

Heureusement Christophe est là pour nous encourager, je passe lui faire un coucou, il en profite pour me donner quelques derniers conseils : ne pas partir trop vite et en garder sous le pied pour la montée. Il m’indique également de faire attention, la dernière portion passe dans l’herbe et le gravier, ça risque d’être un peu dur. Les conseils ont beau être judicieux ils ne font que me traverser, j’ai déjà le scénario de ma course idéale en tête. Pas d’improvisation maintenant, je vais m’en tenir au script.

Rien de bien impressionnant pour qui fait du trail, ceci dit avec une grosse intensité le profil promet de faire mal. Sans me carboniser d’entrée de jeu je compte profiter des deux premiers kilomètres plutôt descendants pour me faire un petit matelas de secondes avant d’aborder la bosse du second kilomètre en gérant mon effort. La descente qui me conduira au 3ème kilomètre devrait me permettre de gonfler encore mon coussin. C’est à partir de là que l’effort commencera vraiment : une montée en deux temps jusqu’à 6,5km où il faudra faire le dos rond en essayant de perdre un minimum de temps. Si je parviens au 7ème dans un état honorable sans perdre trop de temps l’objectif me paraît atteignable avec un final qui me permettra de dérouler. J’ai réglé un bip tous les 500m sur ma montre afin de pouvoir réguler mon rythme au mieux et éviter de faire de gros décrochages. Bref, on verra bien…

Rien de bien impressionnant pour qui fait du trail, ceci dit avec une grosse intensité le profil promet de faire mal. Sans me carboniser d’entrée de jeu je compte profiter des deux premiers kilomètres plutôt descendants pour me faire un petit matelas de secondes avant d’aborder la bosse du second kilomètre en gérant mon effort. La descente qui me conduira au 3ème kilomètre devrait me permettre de gonfler encore mon coussin. C’est à partir de là que l’effort commencera vraiment : une montée en deux temps jusqu’à 6,5km où il faudra faire le dos rond en essayant de perdre un minimum de temps. Si je parviens au 7ème dans un état honorable sans perdre trop de temps l’objectif me paraît atteignable avec un final qui me permettra de dérouler. J’ai réglé un bip tous les 500m sur ma montre afin de pouvoir réguler mon rythme au mieux et éviter de faire de gros décrochages. Bref, on verra bien…

Chris me conseille de faire monter un peu le cardio. Ce conseil là ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd, je file de ce pas faire quelques petites accélérations. Les jambes frétillent, la motivation est là, je file me réfugier dans le sas de départ à 10 minutes du coup de pétard. Le sas est blindé, je me faufile vers l’avant en faisant coucou aux copains en passant. Malgré mes efforts je me trouve bloqué à quelques mètres de la ligne, environ 5 files de coureurs sont stationnées devant moi. Ça promet de bousculer un peu mais je devrais rapidement m’en extirper.

Cette fois je suis dans ma bulle, mon plan de course clairement imprimé dans ma tête. Je me sens étonnamment calme à quelques secondes du départ, sans doute grâce aux copains qui m’entourent et à la confiance que j’ai accumulée pendant ma préparation.

Le décompte débute, je souhaite bonne course aux autres et c’est parti ! Enfin presque, nous marchons jusqu’à la ligne de départ… Je m’élance tout doucement, complètement pris dans un bouchon. Mon sang bouillonne, le fauve est libéré. J’essaie de me faufiler sans succès, j’écarte quelques coureurs d’une pression sur l’épaule avant de constater que le 5,8km devait s’élancer devant nous. Excédé par cette mauvaise idée de l’organisation j’explose « Mais qu’est-ce qu’ils font là ces glands ? ». Très classe, je ne me reconnais pas moi-même… Ca a au moins le mérite de me prouver à quel point j’ai envie de bien faire aujourd’hui.

Après cette petite séquence galère j’arrive enfin à avoir un horizon dégagé sur le bitume et les immeubles, je dépasse Florian qui s’en est un peu mieux tiré que moi avant de reprendre ce filou de Jean qui a vraisemblablement réussi à se glisser à l’avant du sas. Ma montre bipe les premiers 500m : 1’40 ! Je suis ravi d’avoir déjà un peu d’avance mais avec les désagréments du départ c’est que le rythme est bien trop rapide, je lève immédiatement le pied pour trouver une allure plus relâchée. Olivier me dépasse immédiatement, pour un mec pas en forme qui n’a pas couru depuis trois semaines il s’en tire plutôt pas mal ! Sans y prendre garde je me cale dans sa roue et me laisse piloter.

Il y a encore un peu de monde devant nous dont les allures varient du tout au tout, les dépassements ne sont pas évidents. Je sacrifie un peu de fraicheur pour dépasser par les trottoirs, pas l’idéal certes mais moins pénible que d’être gêné. Ma montre bipe le premier kilomètre alors que le panneau de l’organisation se trouve à encore une cinquantaine de mètres… 3’28 à ma montre, 3’37 devant le panneau. Je suis supposé tourner en 3’36, selon les manifestants et selon la police je suis dans les clous, ce 10 est bien lancé !

Au détour d’un virage qui remonte légèrement un petit orchestre nous attend. L’intention est bonne mais ils ne sont pas dans le tempo de la course, le jazz mollasson c’est chouette, mais un petit coup d’ACDC me serait nettement plus bénéfique. Une petite descente me permet de lâcher mes jambes pour la première fois de ma journée, voilà quelques secondes de gagnées à moindres frais. En passant je reconnais un coureur qui me rappelle de mauvais souvenirs, un grand black très puissant de Feyzin que je dépasse régulièrement dans les premiers kilomètres des courses locales avant de m’écrouler lamentablement pour me faire déposer. Aujourd’hui je compte bien rompre la série ! Au loin j’entends Chris hurler comme un putois pour nous encourager Olivier et moi, je lui fais signe en passant que tout se passe à merveille.

Foulées San-Priotes

Nous voilà au pied de la première bosse, je suis toujours dans la roue d’Olivier avec des sensations relativement bonnes. La montée est nettement plus raide que je ne m’y attendais, je lâche donc un peu de lest pour ne pas me carboniser. Autour de nous les visages sont déjà marqués, même si cette petite côte prélève son tribu je me sens toujours assez bien, nous relançons assez fort dans la descente qui arrive tandis que les bips de mon chrono me donnent toujours des signes positifs, je grappille petit à petit. Nous passons devant un haut-parleur qui balance du nirvana et me donne un petit coup de fouet, je fais un petit signe de la main en guise de remerciement. Bientôt le 3ème kilomètre et j’ai toujours ce décalage d’une centaine de mètre avec les panneaux. Je décide de me caller sur les intervalles de ma montre qui me semblent plus fiables, je ferais le point sur le chrono en passant à la mi-course.

La descente est déjà terminée, à présent j’entre dans le vif du sujet avec la longue montée. Je profite d’un virage pour relancer en doublant une féminine tandis que je sens Olivier décrocher. Etant habitué à être loin derrière lui j’ai comme un doute sur ma gestion de l’effort, je me demande si je ne suis pas parti trop vite… Je commence à cogiter, les sensations ne sont pas parfaites : mon cœur tambourine et j’ai un peu mal. J’active immédiatement le petit levier mental que j’ai découvert ces dernières semaines, je ne me sens pas si mal, aucun témoin n’est encore dans le rouge, je suis capable d’aller au bout. J’essaie de rester positif et de me motiver : je vais bientôt repasser au niveau de la ligne de départ, Chris et Laurence seront peut-être là pour m’encourager, j’ai hâte de les voir !

Quelques spectateurs nous attendent alors que nous passons à côté de l’arche d’arrivée, j’entends Alex m’encourager en passant, ça fait du bien !

Foulées San-Priotes

Je cherche des yeux Chris ou Laurence, peut-être après le virage ? Ah non, personne… Par contre une grosse bosse m’accueille à bras ouverts… Bientôt la mi-course, je dois m’accrocher. Je baisse de régime pour limiter l’impact sur le cardio alors que je continue de dépasser des coureurs. Même si je commence à souffrir j’ai la sensation de faire une excellente course, question chrono par contre je n’ai aucune certitude… Je passe devant le ravito sans un regard et débouche immédiatement sur la 5ème borne : 18’01 au chrono. Une seconde de retard à la mi-course malgré ce décalage bizarre de mon GPS, je prends avec plaisir. La seconde partie promet d’être terrible mais j’ai la foi.

J’arrive à la séparation du parcours du 5.8km mais ça ne change plus grand-chose à présent, il n’y a pas foule devant moi. Après la ville nous partons maintenant dans la pampa, c’est déjà plus agréable ! Encore 2 bornes à m’accrocher et je pourrais enfin me laisser dérouler, ou du moins j’essaie de m’en convaincre… La côte s’intensifie, ce pourcentage misérable me fait l’effet d’un mur, mes pensées se bousculent dans ma tête. J’appuie sur mon petit levier mental, j’utilise toutes les carottes à ma disposition pour faire passer l’orage. Ma montre bipe les 500m : 1’58. 10s de perdues, gloups !

Un replat, enfin ! J’y crois toujours, je relance les jambes pour tenter de retrouver ma vitesse de croisière. Le moral revient, le rythme est bon, je n’ai fait que croquer des coureurs depuis le départ, la partie de pac-man est loin d’être terminée. Une légère descente à l’approche des 6km achève de me relancer dans le combat. Une borne à tenir !

Je réalise que j’entre à présent dans l’inconnu, je n’ai pas passé de séance de plus de 6km à cette allure pendant ma phase d’entrainement. Je me jette dedans avec plaisir, j’ai hâte de redécouvrir ces sensations. L’effort est certes dur mais jusqu’à présent j’arrive à suivre mon plan, mes sensations sont loin d’être mauvaises et je suis convaincu que le plus difficile est passé. Je suis en train d’avaler le dernier coup de cul, plus rien ne peut m’empêcher d’y arriver… excepté ce petit vent qui vient me cueillir lorsque j’arrive au sommet de la bosse ! Mince, juste au moment où j’étais prêt à lâcher la bride à mes jambes… Je lutte contre le vent en veillant toujours à ne pas aller au-delà d’une certaine intensité, mon rythme en pâti mais je me raccroche à un compte rendu trouvé au détour de kikourou où le mec avait réussi à refaire un retard d’une quinzaine de secondes dans la dernière descente.

Après un sixième kilomètre rapide, le septième me fait à nouveau perdre une douzaine de secondes. Aie, cette fois le moral est touché pour de bon. J’aurais trop de retard à combler, d’autant plus que mon GPS est de plus en plus décalé par rapport aux pancartes. Pas le temps de me lamenter, je n’ai jamais été aussi prêt de faire un gros chrono, hors de question de lâcher maintenant. Je ferais un point au panneau des 9km, j’aviserais à ce moment.

Depuis le départ j’essaie de ne pas penser à la tâche dans son ensemble mais plutôt à de petits objectifs : partir à la bonne allure, prendre de l’avance dans les premiers kilomètres, faire le point au 5ème, franchir la bosse… Mais à l’approche de l’arrivée je commence à penser à la douleur qui m’attend dans les minutes à venir. Je me focalise sur le prochain 1500m qui sera crucial, je ne dois pas lâcher de temps et garder du jus pour allumer dans la descente.

Le terrain est plus plat à présent, j’ai quelques coureurs dans le viseur et mes jambes recommencent à tourner normalement. Même si les 35’59 me semblent inaccessibles sur ce parcours de dingue j’essaie me convaincre que 36’05 me contenteront aujourd’hui. Les bips de ma montre sont revenus dans la bonne cadence, j’ai la tête froide et les idées claires : contre toute attente j’ai la conviction qu’il m’en reste sous le pied alors que je suis à moins de deux kilomètres de l’arrivée. La lucidité revient, les coureurs que je reprends sont au bord de l’agonie, en comparaison mon souffle est calé sur un rythme régulier. Je parviens même à apprécier brièvement le paysage.

Je sens que la route commence à avoir une légère déclivité à 1500m de l’arrivée, je sais que je dois attaquer maintenant mais l’effort à fournir me semble énorme. Je pense à Laurence qui doit m’attendre à présent, Christophe qui compte sur moi, aux deux mois d’entrainement à suer sang et eau… Une bonne inspiration et j’accélère la cadence, l’effort est soutenu mais je tiens le choc. Je calcule rapidement que je dois passer en 32’24 au 9ème. Compte tenu de ma fraicheur plus que douteuse j’espère passer en moins 32’30, grappiller 6s ne me semble pas insurmontable. Le couperet tombe : 32’38, soit 14s à rattraper. Je dois passer mon dernier kilomètre en… non, j’arrête les calculs, je fonce !

Je bifurque à la suite de deux coureurs sur une allée repérée pendant l’échauffement, je sais que l’arrivée est à deux pas mais je me souviens d’une petite bosse à franchir. Le coup au moral est bref, un signaleur nous indique de tourner en direction du stade, juste avant la bosse, ouf. La descente se fait plus franche à présent, je maintiens mon effort en me répétant que je n’ai pas le droit de lâcher, je préfère finir sur le carreau plutôt que d’avoir des regrets.

Après un petit virage j’entends les hurlements de Chris placé en contrebas. Je suis à un doigt de lâcher prise mais il arrive à trouver les mots pour me redonner un peu de courage. J’aperçois enfin Laurence placée un peu plus loin, en passant j’essaie de lui faire un petit sourire mais l’effort me coute. Virginie, Hugo et Gaby sont un peu plus loin à m’encourager également, cette fois pas de sourire, plutôt une horrible grimace tant je suis dans le rouge. J’ai été incapable de le leur montrer mais leurs encouragements m’ont touchés, cette fois je suis résigné à finir au carton, je lâche mes dernières forces malgré des virages secs. Je croque encore quelques coureurs en sortant du stade et je m’élance pour la dernière ligne droite, les jambes tournent à plein régime, mon cardio est proche de l’explosion et mes poumons sont en feu. Je croque mon dernier coureur avant de franchir la ligne et de couper le chono. 35’44. Incroyable ! J’étais persuadé d’échouer de quelques secondes. Je ne regarde même pas mon classement tant cela passe après, je jubile.

Plus qu’à filer rejoindre mon fan-club pour partager cette bonne surprise en encourageant les copains qui en terminent avant d’aller passer des vêtements chauds.

Encore un immense merci à Christophe pour m’avoir soutenu, m’avoir empêché de faire n’importe quoi et pour avoir compris mes interrogations au cours de ces deux mois ainsi qu’à Yann et Olivier, mes sparring-partners sans qui j’en aurais sérieusement bavé !

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